Utilisation abusive d’une carte après son dépôt dans un bar
Le client expliqua que des autochtones les avaient emmenés, lui et des amis, dans ce bar karaoké. Après avoir réglé une première boisson avec sa carte de crédit, il avait été invité par le serveur à déposer sa carte au bar à titre de sûreté. Il avait alors laissé sa carte plusieurs heures sous la garde du personnel de service, une pratique qui, selon lui, est courante dans les discothèques et bars du monde entier. Pendant son passage au bar, la carte avait ensuite été utilisée de manière frauduleuse par des tiers non autorisés pour payer des boissons. Les auteurs avaient certainement pu lire la combinaison de chiffres du code NIP sur un lecteur de carte manipulé. Pour lui, le schéma des transactions montrait clairement qu’il s’agissait d’une utilisation frauduleuse, avec une succession rapide de montants élevés. Il y avait également eu plusieurs tentatives de paiement avortées dont le montant décroissait de tentative en tentative, signe qu’on avait procédé par tâtonnements pour s’approcher de la limite.
La banque argua que les retraits n’avaient pas à être remboursés dans la mesure où ils avaient été effectués avec la carte originale et le code NIP personnel du client. L’utilisateur de la carte devait détenir le code, puisque les paiements avaient été effectués avec le bon code NIP. Celui-ci n’étant pas enregistré sur la carte, il n’avait donc pas pu s’en aider pour le découvrir. Par conséquent, le client ne pouvait pas prouver de façon incontestable qu’il avait satisfait à ses obligations de diligence, et en particulier au devoir de conserver la carte et le code NIP soigneusement et séparément. Les transactions en elles-mêmes n’avaient pas non plus semblé suspectes. Dans de tels établissements, il n’est pas rare que plusieurs montants élevés soient réglés en l’espace de quelques heures.
L’Ombudsman n’a pas connaissance du fait qu’il est monnaie courante de placer des cartes de crédit sous la garde du personnel de service des bars. Au contraire, les émetteurs de cartes, associations de consommateurs et autorités préconisent – en particulier à l’étranger – de ne pas lâcher sa carte de crédit, de toujours garder un œil sur les transactions de paiement et de demander la restitution immédiate de ladite carte. Le fait que le client ait confié sa carte de crédit au personnel de service du bar pendant un certain temps apparaît donc comme une négligence. Ainsi, l’Ombudsman considère que la banque a des raisons valables de ne pas rembourser les transactions effectuées dans le bar, même si l’on part du principe qu’il s’agissait d’une utilisation frauduleuse de la carte par des tiers non autorisés. En général, une banque ne procède à un remboursement que si le client est en mesure de prouver qu’il a satisfait à toutes les obligations de diligence prévues par les contrats applicables. Les dispositions correspondantes relatives à la carte de crédit reposent sur le principe que la partie qui doit assumer le risque est celle qui peut influer sur sa survenance par son comportement. De fait, les conditions des cartes précisent généralement que toute personne ayant utilisé la carte avec le code NIP y afférent est considérée comme autorisée à effectuer la transaction, même si cette personne n’est pas l’ayant droit de la carte. Les conditions prévoient uniquement une indemnisation par la banque dans le cas où le titulaire de la carte peut démontrer qu’il a satisfait à toutes les obligations de diligence conformément aux contrats applicables. L’Ombudsman n’a pas connaissance de décisions judiciaires où le caractère légitime de cette répartition contractuelle des risques n’aurait pas été reconnu. A la lumière de ces éléments, l’Ombudsman annonça au client qu’il n’engagerait pas de procédure de médiation.