Risque de concentration dans le conseil en placement
Les clients avaient retiré environ 500 000 CHF de la vente de leur société et souhaitaient placer cet argent à long terme. C’est ainsi que la banque leur avait recommandé notamment d’acheter au total 400 de ses actions – un risque de concentration, dont ils estimaient ne pas avoir été avertis. Selon eux, il n’y avait pas eu non plus de clarification des risques lors de l’entretien de conseil en placement. Ils affirmèrent qu’ils n’avaient pas fait l’objet d’un suivi actif à la suite de leur investissement, et qu’ils avaient essuyé, avec les actions, une perte d’environ 25 000 CHF dont la banque devait les indemniser au moins en partie.
Dans sa prise de position sollicitée par l’Ombudsman, la banque indiqua que l’ouverture d’un compte d’épargne actionnaire et l’acquisition des actions de la banque avaient précédé l’entretien de placement à proprement parler. Les clients avaient découvert ce produit auprès de leur ancienne banque et s’étaient étonnés de n’avoir à acheter qu’un nombre relativement limité d’actions pour bénéficier des avantages du compte d’épargne actionnaire auprès de cette nouvelle banque. Ils avaient alors explicitement souhaité acquérir 400 actions, bien plus que le minimum obligatoire. La banque affirma en outre que, lors de l’entretien de placement qui avait suivi, elle s’était soigneusement renseignée sur l’horizon de placement, la capacité de risque, la propension au risque ainsi que sur l’expérience des clients en matière d’instruments financiers, et qu’elle avait consigné les conclusions de cet entretien. Les clients s’étaient vu remettre la brochure de l’Association suisse des banquiers «Risques particuliers dans le négoce des titres», qui explique le risque de concentration en termes généraux. La banque ajouta qu’ils avaient été avertis oralement du risque encouru et de ses conséquences possibles par un conseiller à la clientèle expérimenté. Un portefeuille diversifié fut composé à la lumière des conclusions de l’entretien de conseil en placement, mais il comportait incontestablement une part élevée d’actions de la banque. Par la suite, les clients s’étaient montrés satisfaits de la mise en œuvre de la proposition de placement. Au final, en tenant compte des intérêts plus élevés du compte d’épargne actionnaire et des dividendes, la perte subie par les clients était très inférieure au montant avancé et atteignait seulement 10 360 CHF en ce qui concerne les actions de la banque. Dans l’ensemble, les placements avaient généré un rendement positif. Aussi la banque n’était-elle pas disposée à indemniser les clients.
L’Ombudsman comprenait le mécontentement des clients au vu des pertes subies. Après avoir entendu les deux parties et consulté les documents, il ne trouva cependant rien à redire au processus de placement. Il estima toutefois que la part incontestablement élevée des actions de la banque dans le portefeuille des clients était problématique et constituait indubitablement un risque de concentration. Il était évident pour l’Ombudsman que les clients auraient dû être clairement informés de cette situation et de ses conséquences possibles lors de l’entretien de conseil en placement. Sur ce point, les parties s’opposaient. Les clients avaient confirmé par leur signature qu’ils avaient bien reçu la brochure de l’Association suisse des banquiers mentionnée par la banque, un document contenant des informations générales sur le risque de concentration. Les clients contestèrent vigoureusement les déclarations de la banque selon lesquelles ils auraient obtenu oralement des informations supplémentaires et spécifiques. Aucun écrit n’allait en ce sens.
Dans la pratique, l’Ombudsman constate régulièrement que les déclarations des parties divergent sur des faits donnés. Les raisons en sont multiples. La première tient à la nature humaine: les souvenirs s’estompent avec le temps, et la perception de certains épisodes peut évoluer, notamment lorsque des événements désagréables se produisent, comme une perte sur des placements en l’occurrence. Si les parties campent sur leurs positions pendant la procédure de médiation et ne parviennent pas à rapprocher leurs versions des faits, l’Ombudsman ne peut clarifier ces divergences avec une procédure d’administration de preuves comme le ferait un tribunal. L’Ombudsman est un médiateur neutre et doit respecter la crédibilité des parties. Après de nouvelles discussions, la banque se déclara toutefois disposée à verser aux clients 2500 CHF à titre de dédommagement, ce qu’ils finirent par accepter sans pour autant se montrer vraiment satisfaits.