Refus du traitement pour cause de complexité et d’inutilité
Il est de moins en moins rare que des clients, notamment ceux représentés par leur avocat, s’adressent à l’Ombudsman alors qu’une médiation apparaît d’emblée vouée à l’échec. L’Ombudsman entend donc, à la lumière de cet exemple, illustrer les critères présidant au refus de traiter un cas.
• Refus catégorique de la demande par la banque
La procédure devant l’Ombudsman est facultative, en ce sens que l’Ombudsman n’a aucune compétence décisionnelle. Il ne peut donc pas contraindre les parties impliquées, mais seulement essayer de convaincre au moyen d’arguments. La procédure ne débouche donc sur une solution que si les deux parties, client et banque, parviennent à un accord. Les conditions pour atteindre cet objectif ne sont guère réunies lorsque la banque – en l’espèce, la direction –, en amont et en connaissant les arguments du client, se déclare opposée à toute solution à l’amiable et refuse catégoriquement toute requête du client.
• Importance du montant en jeu
L’expérience montre que les litiges portant sur des sommes importantes – en l’espèce, un minimum de 14 millions de CHF – se règlent sans l’intervention d’un intermédiaire externe ou alors sont soumis à un tribunal ou à un tribunal arbitral pour être tranchés. Lorsqu’une banque ne parvient pas à une solution à l’amiable sans recourir à un tiers, il est peu probable qu’elle se déclare ensuite spontanément, à savoir dans le cadre d’une procédure de médiation, prête à verser des millions.
En outre, il y a tout lieu de penser que le client n’est pas non plus disposé à revoir spontanément ses exigences à la baisse; les chances de parvenir à un accord satisfaisant les deux parties sont donc extrêmement minces.
• Altération de la relation bancaire
Avant qu’une banque ne dénonce un mandat rentable de plus de 80 millions de CHF, elle explore toutes les possibilités de règlement d’un litige. Si, au terme des vérifications, elle se voit malgré tout contrainte de résilier à la fois le mandat de gestion de fortune et la relation, il est fort probable que la dégradation des rapports sera telle qu’elle exclue toute solution à l’amiable.
• Complexité des questions de fait et de droit
Lorsqu’une partie a besoin de 36 pages pour exposer les faits et motiver sa demande, la complexité du problème saute aux yeux. En outre, la correspondance des parties révélait que la banque avait une autre vision de certains aspects et que, de surcroît, elle tirait d’autres conséquences juridiques de sa version.
De plus, la cliente demandait également le remboursement des «rétrocessions», abordant ainsi la question des rémunérations que la banque avait perçues de tiers dans le cadre de l’intermédiation ou de la conclusion de transactions. La situation juridique étant controversée, il semble irréaliste qu’une banque procède spontanément à des versements à ce titre tant que la situation n’aura pas été clarifiée par le Tribunal fédéral. L’Ombudsman a constamment refusé de faire office d’intermédiaire dans de tels cas.
• Durée de la procédure et prévisibilité de problèmes de preuve
Lorsqu’il ressort d’emblée des documents que différents points de fait devront être appréciés et qu’il est probable que des points essentiels ne pourront pas être éclaircis compte tenu des affirmations contradictoires des parties et de l’absence d’arguments convaincants de ces mêmes parties quant à l’authenticité de leur version, la procédure devra de toute façon être suspendue et le client invité à porter l’affaire devant un juge possédant les compétences nécessaires (ou, le cas échéant, devant un tribunal arbitral).
Dans ces circonstances, l’Ombudsman renonça à la médiation bien qu’il ne pût exclure avec certitude un comportement fautif de la banque. Nul ne profite d’une situation où de gros efforts sont déployés pour obtenir des éclaircissements et finalement parvenir à la conclusion, au terme d’une longue procédure, qu’aucune solution n’est possible. Pour cette raison, le règlement applicable à l’activité de l’Ombudsman autorise ce dernier à refuser.